lundi 1 octobre 2018

Etat des lieux des formations en prison Année 2017



La Fédération des Associations pour la Formation et l’Education en Prison (Fafep) a récemment finalisé un état des lieux des formations en prison pour l'année 2017



Cet état des lieux a été réalisé sur base d’informations et de commentaires fournis par les membres de la Fafep  de septembre à décembre 2017 ( )

Il  a pour objectifs de :
-        - donner un aperçu synthétique des formations organisées par les opérateurs de formation (les associations et les écoles de promotion sociale) dans les différentes prisons francophone, en 2017;
-        - constater les reprises et poursuites des formations après les impacts des grèves du printemps 2016;
-
signaler les nouvelles formations mises sur pied grâce à un appel à projet ponctuel de la Région wallonne;
-
signaler l’impact des nouveaux horaires pénitentiaires dans le cadre de la soi-disant rationalisation de l'horaire pénitentiaire;
-        - tenter une première évaluation de l’impact de la nouvelle mesure concernant les congés pénitentiaires prolongés mise en place sans concertation durant l'été 2017;
-        - faire part des questionnements relatifs à la prise en charge des tâches de coordination, suite à la disparition annoncée des coordinations locales assurées par les services d’aide aux détenus
-       et rappeler les difficultés constatées ainsi que les propositions de solutions élaborées par la FAFEP.

Partenaire de longue date de la FAFEP, Aide et Reclassement a participé à ce travail pour les trois prisons où l'ASBL a été active dans le cadre de son programme Tremplin pour l'insertion mais aussi de sa participation au projet Reinsert.

Principales difficultés rencontrées

Nous croyons intéressant de pointer ici quelques-unes des difficultés rencontrées par les associations actives sur le terrain et tout d'abord les difficultés propres au milieu carcéral.

-    Chaque établissement pénitentiaire applique ses propres règles. L’organisation des formations dépend de la direction et du personnel pénitentiaire ainsi que de la coordination locale assurée jusqu’en fin 2017 par les services d’Aide aux détenus (avec des spécificités : contenu des tâches assurées et charges horaires) selon les prisons.

-    Les cours sont régulièrement supprimés suite aux mouvements sociaux (grèves, manifestations, …) ou par manque de personnel surveillant ou pour des raisons de sécurité. En 2017, toutes les prisons sont concernées, à divers degrés.

 -   Nous déplorons une politique de plus en plus sécuritaire qui ne favorise pas le développement d’activités et de formations des détenus ainsi que l’absence des plans de détention, pourtant prévus légalement..

-    Les motifs d’absence des étudiants sont nombreux. Parmi les plus récurrents, on retrouve : 
les transferts d’un établissement pénitentiaire vers un autre, les congés pénitentiaires, les comparutions  au Tribunal d’application des peines (ou autres comparutions), les transferts médicaux aux CMC et hôpitaux, les maladies, les appels par les divers services sociaux, les directions, les greffes, la police, les avocats, …, les visites, …, les appels des surveillants pour se rendre aux cours parfois aléatoires, les nombreuses punitions, …

-     La perte d’autonomie, (institutionnalisation ), est flagrante avec des motivations pour l’étude extrêmement fragiles.  La concurrence avec le  travail pénitentiaire mieux rémunéré que les formations, reste un point crucial.    Beaucoup de détenus privilégient le travail afin, notamment, de commencer l’indemnisation des parties civiles et/ou en prévision de leur libération voire simplement  pour améliorer leur ordinaire.

On peut encore citer :
 -    les horaires incompatibles (les formations sont organisées en même temps que le travail, l’accès aux douches, aux préaux, aux visites, les cultes, ….); le manque de locaux adéquats pour des activités collectives;  la quasi impossibilité dans certaines prisons de poursuivre des cours durant les congés scolaires (parfois afin de récupérer des heures non données suite aux grèves et interdictions d’entrée).
-
-    En outre, selon les établissements, il y a une forte proportion de prévenus et relativement peu de condamnés. Dès lors, le suivi d’une formation longue est rapidement mis en péril et les absences aux cours sont nombreuses (Palais, entretiens avec l’avocat, …).

-    Enfin, en juillet 2017, l’administration pénitentiaire a mis en place des congés pénitentiaires d’une semaine sur deux. Ces congés sont octroyés aux détenus proches de leur libération. Avec un taux de présence d’au mieux 50%, il est très difficile, voire impossible d’organiser une formation cohérente dans un cadre collectif.
L
-    Quant à la rationalisation des horaires, elle n’a finalement eu d’effet préjudiciable sur l’organisation des formations que dans quelques prisons(dont Huy) mais elle a été la source de nombreuses inquiétudes.. De nombreuses rumeurs et informations, propositions ont circulé avant que l’on ne constate finalement qu’un impact relativement minime sur les horaires dans la plupart des prisons.


Appel à projets de la Région wallonne (ex projets Tillieux)

Plusieurs formations ont pu être mises sur pied en 2017, suite à un appel à projet en Région wallonne. Au moment de finaliser le présent état des lieux, les opérateurs (CISP) attendaient encore les accords officiels permettant à ces formations de s’installer durablement.

Si les appels à projet ont permis  d’initier certaines formations, dans et hors prison, il serait dommage que l’importante dose d’énergie investie pour mettre sur pied les nouveaux modules, ne soit pas « rentabilisée » sur le long terme …
 

Arrêt des coordinations locales assurées par les Services d’Aide aux Détenus

En 2017, on a vu les effets de la disparition annoncée de ces coordinations locales avec, dans certaines prisons, un départ prématuré du coordinateur-trice (Namur, Ittre, Nivelles). Selon les cas, les coordinateurs assuraient des tâches logistiques, certains suivis auprès des détenus, transmettaient des informations utiles aux différents partenaires pédagogiques. Dans les meilleurs des cas, ils avaient permis, de redynamiser l'offre de formations de renforcer la concertation entre les différents acteurs et les directions.

Fin juin, les membres de la FAFEP avaient encore de nombreuses questions  à propos des missions qui seraient assurées par les nouveaux délégués  issus des Maisons de Justice  Il semble que l’important volet lié à la logistique ne serait plus assuré par ceux-ci et que leur présence dans les prisons serait moins importante que celle des précédents coordinateurs (en général présents à la fois pour la coordination et l’aide sociale, ce qui permettait une bonne connaissance des différents acteurs, intervenants et « culture » de la prison).

 Nous avons listé les tâches de coordination à assurer impérativement :

-        Gestion hebdomadaire des plannings (horaire, locaux, listes des participants –
-        Contacts avec les greffes et la comptabilité pour la transmission des documents administratifs et des listes de présence pour l’allocation d’étude
-        Gestion du matériel et des fournitures nécessaires
-        Aplanissement de diverses et nombreuses situations difficiles (événements conflictuels …) au quotidien
-        Concertation, partage des informations entre les différents intervenants, relais vers les services pénitentiaires et les services psycho-sociaux
-        Soutien des projets pédagogiques, des valeurs et  normes pédagogiques et administratives à respecter (objectifs, contenus, méthodologies, gestion des absences, gestion des « mouvements » vers les cours…)
-        Soutien équitable des différents opérateurs de formation (attribution des locaux et horaires, informations aux détenus, …)
-        Préparation, animation et secrétariat des réunions locales avec les opérateurs pédagogiques, culturels, sportifs, psycho-sociaux
-        Liens avec l’extra muros
-        Mise en œuvre effective de l’accord de coopération et de différents textes législatifs et règlementations
-        Transmission des difficultés, revendications et solutions proposées par le secteur pédagogiques aux instances politiques et administratives (relais vers les réunions locales prévues dans l’accord de coopération, la CIM et les différents ministres concernés

Il  semble bien que l’ensemble de ces tâches ne seraient pas assurées par les nouveaux délégués intra muros, en particulier, ce qui a trait à la logistique (les trois premiers points cités plus haut). Qui s’en chargerait ?  Vu cette incertitude, Aide et Reclassement a fait le choix de préserver le poste et de maintenir un temps de travail pour le soutien à la coordination des formations à la prison de Marneffe.

















( )Un inventaire plus complet et détaillé peut habituellement être consulté sur le site de la Caap (www.caap.be). Pour des raisons de refonte du site, il n’a pas été actualisé en 2017 mais devrait l'être à l’automne 2018, selon les informations de la Caap.