vendredi 22 avril 2011

L'indispensable coordination des actions en prison

L’organisation de l’offre d’aide et de services aux personnes incarcérées a souffert, dans notre pays, des réformes successives de l’Etat. Depuis plus de dix ans, le secteur déplore les conséquences néfastes de l' éclatement entre les compétences relatives à la gestion de la détention d'une part et celles relatives aux diverses matières qui peuvent être regroupées sous le vocable général d’aide psychosociale et d’éducation[1] en prison, (enseignement, formation, culture, sport, développement personnel, etc.).

Cet état de choses se répercute non seulement sur le plan institutionnel, dans la difficulté de construire une politique cohérente impliquant les différents niveaux de pouvoir mais, également, sur la qualité et la quantité des prestations qui peuvent être offertes sur le terrain.

Dans ce contexte, l’élaboration d’un plan de détention orienté vers l’insertion ou la mise en place d’un parcours d’insertion, s’amorçant dès que possible durant la détention, sont rendues particulièrement difficiles.

De l’avis de beaucoup, l’entrée en vigueur, progressive, de la loi fédérale de principe relative au statut externe du détenu et à l’administration pénitentiaire du 12 janvier 2005 a entraîné un appel pour une harmonisation et une intensification de l’offre de services et de formations couvrant l’ensemble des compétences communautaires et régionales, au bénéfice des personnes incarcérées. Rapidement, il est apparu qu’une telle évolution supposait la mise en place d’une concertation interdépartementale et qu’elle impliquait un dialogue avec le monde associatif, dialogue rendu plus difficile par la grande dispersion des acteurs sociaux intervenant, à titre principal ou plus ponctuellement, dans ce secteur.

Depuis quelques années, des efforts ont été accomplis pour mettre en place une politique cohérente des communautés et régions dans les prisons, amorcer les concertations nécessaires à son élaboration et associer, si possible durablement, les diverses associations concernées à cette dynamique.

Nous rendons compte des ces efforts dans un article paru dans la revue L’observatoire ([2])

Plusieurs initiatives intervenues récemment laissent espérer que la mobilisation des cinq dernières années ne soit pas vaine.

Nous pouvons citer la récente adaptation du Décret relatif à l’aide sociale aux détenus, confiant aux SASD, la mission supplémentaire d’assurer la coordination des offres de services et d’activités menées dans l’établissement qu’ils couvrent (article 3,§1, 10°).

De son côté, le processus politique a abouti à la signature d’un accord de coopération visant à assurer la coordination des politiques menées par la Communauté française, la Région wallonne et la Cocof.[3] Le texte détermine la composition et les missions de la conférence interministérielle qui, depuis 2010, assume cette mission. Le comité de pilotage permanent, chargé d’alimenter ses travaux, a produit ses premières conclusions en décembre dernier. Outre les représentants des quinze ministres et des administrations concernées, il accueille des représentants du secteur associatif. Sont également invités, à titre d’observateurs, des représentants du SPF Justice, du ministre de la Justice et de la Régie des Bâtiments.

Placés sous la présidence d’un fonctionnaire attaché au Service de l’Aide aux Détenus, différents groupes de travail thématiques ont alimenté, durant les derniers mois l’examen de cinq thèmes jugés prioritaires. Sans surprise, la coordination est au nombre de ceux-ci.

Du côté des SASD, la mission de coordination (locale) des actions d’éducation permanente, de formation et autres activités culturelles reste embryonnaire et sous financée, bien que le principe en soit affirmé dans la note communautaire reprenant les propositions relatives à un projet d’accord de coopération à établir avec le Fédéral. Quelques expériences pilotes révèlent la richesse potentielle de dispositifs visant à renforcer l’articulation entre les actions en milieu carcéral et le parcours d’insertion post-pénitentiaire : mentionnons le programme TIRCIS Tremplin pour l’insertion, lancé dans trois prisons, avec l’appui du Fonds Social Européen et le projet API mis en place dans la région namuroise.

Les prochains mois pourraient s'avérer décisifs avec la perspective d'un nouvel arrêté précisant la portée et renforçant le financement de la nouvelle mission de coordination confiée à nos services.

[1] Ce terme doit être entendu dans l’acception large de la Recommandation R(89) 12 du Conseil de l’Europe.
[2] De la nécessaire coordination des interventions en milieu carcéral, L’observatoire, n°66, pp. 48 à 51
[3] Accord de coopération du 23-01-2009, visant la coordination des politiques d’intervention en lien avec le milieu carcéral M.B. 25-08-2009.





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